Principes de bases

Le Stoïcisme

D'après Jacques Chevalier

Histoire de la pensée

Tome II   

Les principes de base

                        « Vivre selon la raison c'est vivre selon la nature » (Jean Brun : le Stoïcisme)

1 - Les quatre passions fondamentales selon les stoïciens   qui vivaient selon la raison selon la nature

•    Jouissance des biens présents      

•     Désir des biens futurs                                 

•    Appréhension des maux futurs               Considérées par eux comme à éviter

 

•     Souffrance des maux présents      

Zenon définit la passion comme un mouvement de l'âme irraisonné et contraire à la nature ou encore comme un élan excessif qui dépasse la mesure, c'est-à-dire l'équilibre naturel. (P.283) Selon Cicéron (Stoïcien tardif) ces troubles entraînent de véritables maladies de l'âme. (Tusculanes IV, 15-36) les passions ****> ont toutes leur source dans l'intempérance qui est une révolte de l'esprit contre la droite raison et proviennent d'un jugement erroné.

 

II - Renaissance, humanisme et christianisme (p. 284)

On sait l'influence qu'exerça le stoïcisme sur l'humanisme renaissant et durant la période qui s'étend de Montaigne à pascal, et l'admiration que professaient Juste Lipse, Du Vair et tant de chrétiens pour une doctrine à laquelle ils demandaient un modèle de grandeur d'âme. Mais que ce modèle fut étranger au Christianisme en son fond, c'est ce que discernent dès cette époque des observateurs perspicaces qui lui reprochent les points ci-dessous

      -        II prêche un idéal inaccessible (Lessius)

      -        Il place le souverain bien dans les vertus humaines (P. Boucher)

      -        II élève le sage au-dessus de Dieu (Silhon)

     -       II se fait « courtisan de la nature » et de ses trompeuses vertus (Balzac) (libre penseur de la Renaissance)

          -       Mais la racine du mal est cette superbe confiance dans l'homme qui lui fait méconnaître sa misère et croire qu'il se suffit à lui-même. (Pascal)

 

III - La morale

La logique stoïcienne n'est qu'un moyen infaillible de distinguer le vrai du faux, c'est-à-dire le bien du mal, et la physique comme la logique n'a d'autre but que de montrer à l'homme son devoir qui est soumission à la nécessité ou au Destin par l'accord de la nature de l'homme avec la nature universelle : par-là toutes deux méritent d'être nommées vertus.

IV -Dieu                                                         

Tel est ce panthéisme naturaliste qui abîme les individus dans le tout. Pourtant Chrysippe a cherché à le corriger pour y laisser une place à l'effort de l'homme et sauvegarder la liberté de l'individu, en montrant que pareil au mouvement d'un cylindre qui placé sur un plan incliné dont la pente est assez forte, doit être mis en branle par une impulsion extérieurs, un acte libre ou partiellement libre,

comme l'assentiment résulte tout à la fois de la représentation (...) et de la forme propre à l'esprit

qui la reçoit selon sa nature et sa volonté même, eh sorte que la force du destin ne s'étendrait

qu'aux circonstances ou aux causes occasionnelles de nos actes et non à nos actes mêmes en tant que procédant de notre initiative propre comme de leur cause principale.

De même qu'ils ont cherché à sauver la liberté humaine et à la concilier avec leur déterminisme, selon un paradoxe commun à nombre de doctrines déterministes, aux calvinistes et à Port-Royal comme au stoïcisme ou au spinozisme, qui exaltent la volonté au moment même où ils la réduisent, les stoïciens se sont efforcés de sauvegarder dans une certaine mesure l'indépendance de l'être et de la nature de Dieu. Et ce point a une telle importance pour eux que Chrysippe n'hésite pas à voir dans la théologie, le mystère auquel la philosophie a pour mission de nous initier, (p. 127)

« Ils disent que l'être providentiel est de même nature que l'être qu'il dirige. Ils disent aussi qu'il est parfait et différent de ce qu'il dirige. » (Origène) Ce Dieu est identifié par eux à la force (souffle, pneuma et intelligence : logos), ce feu artiste qui modèle les choses est comparé au miel qui court à travers les rayons : « Etre tout puissant, éternel, auteur et maître de la nature qui gouverne toutes choses selon la Loi, de qui nous venons, à qui obéit tout cet univers qui tourne autour de la terre, allant où il le mène et se laissant agir par lui. » (Sénèque, Ep. 9}

Sénèque compare le sage à Jupiter qui, « lorsque le monde et les dieux par la conflagration, retournent à leur ancien chaos, la nature cessant pour un temps d'exister, se recueille en lui-même, livré à ses seules pensées ». Ainsi les stoïciens attribuent à ce dieu immanent une certaine indépendance ou transcendance à l'égard du monde : il en est selon leur théologie populaire, l'architecte et l'ordonnateur. Comme l'observe Chrysippe, il mène l'univers et chaque chose à son bien propre, selon les lois d'une finalité externe, d'ailleurs subordonnée à l'homme, c'est-à-dire par un agencement réciproque d'êtres indépendants mais hiérarchisés, agencement qui ne peut s'expliquer que par l'intervention d'une cause transcendante, extérieure au processus.

Dieu mène donc toutes choses à leur bien, à travers les maux qui sont l'accompagnement nécessaire du bien, qui en sont les moyens en même temps que le complément, car il n'y a pas de contraire sans son contraire. (...)

Enfin ce dieu des stoïciens, vivant, immortel, raisonnable, parfait, intelligent et heureux, étranger au mal, Dieu, esprit, destin ou Zeus, ces termes désignant la même réalité sous plusieurs noms, ce Dieu qui est l'ordonnateur de toutes choses sans pourtant les avoir créées, et comme leur père commun, sans avoir cependant la forme humaine veille sur le monde et sur tout ce qui est dans le monde, qu'il pénètre en toutes ses parties, où il opère tout, dont il est le principe vivifiant et, selon Zenon, la substance même . Comme il est de l'essence de la neige d'être froide et d'être blanche, il est de l'essence de Dieu de prévoir et de pourvoir. Ainsi le dieu des stoïciens - trait nouveau par rapport à Platon et Aristote - est un dieu providence qui s'occupe de l'homme, qui entre en rapport (par la nature)  avec lui, à qui l'homme peut s'adresser par la prière. (...)    

Cependant il est juste de noter que les vues providentialistes des stoïciens, surtout de la dernière période, ont pris souvent un accent de soumission volontaire d'acceptation de la volonté de Dieu, qui, chez un Epictète et un Sénèque rend presque un son chrétien. Ainsi le premier, par exemple, dénomme fréquemment Dieu le Père des hommes, il n'hésite pas à appeler l'homme fils de Dieu, et il écrit dans ses entretiens : «_Si j’étais rossignol je ferais le métier de rossignol ; si j'étais cygne, je ferais le métier de cygne. Je suis un être raisonnable : il me faut donc chanter Dieu. Voilà mon métier et je le fais Sénèque d'autre part, dans son petit traité De la Providence, écrit : « les dieux sont toujours bons à l'égard des bons, car la nature ne souffre pas que le bien nuise au bien. Entre les hommes de bien et les dieux il existe une véritable amitié dont la vertu est le lien : une amitié, que dis-je ? Une affinité et parenté essentielle, car l'homme de bien ne diffère de Dieu que par la durée :  il est son disciple et son émule, il est son enfant, et le Créateur l'élève dans la pratique de la vertu avec la rigueur d'un père inflexible.  (panthéisme)

Date de dernière mise à jour : 2021-07-05 10:28:28